L’intelligence artificielle (IA) révolutionne déjà de nombreux aspects de notre vie, qu'il s'agisse de la traduction de textes, de la recherche documentaire, ou même de la formation continue. Son impact est tel que particuliers et entreprises adoptent de plus en plus ces technologies pour optimiser leurs opérations, offrant ainsi des solutions plus rapides, efficaces et économiques. Au cœur de cette transformation se trouve l’IA générative, une branche de l’IA reposant sur des algorithmes d’apprentissage automatique extrêmement larges et puissants, capables de générer du texte de manière cohérente et contextuellement pertinente.
Les modèles de langage de grande taille (LLMs) tels que GPT-3, GPT-4, et leurs homologues ont fait des avancées spectaculaires, rendant possible la création de contenus textuels de haute qualité, souvent indiscernables de ceux produits par des humains. Cependant, ces progrès s’accompagnent de défis et de préoccupations significatives. Parmi ceux-ci, les fuites de données et la perte de propriété intellectuelle sont des risques majeurs associés à l’utilisation de ces outils. Mais au-delà de ces préoccupations, une menace particulièrement insidieuse et de plus en plus fréquente émerge : le détournement des règles de fonctionnement et de sécurité des IA, connu sous le nom de prompt injection.
Dans ce contexte, il est essentiel de comprendre non seulement les bénéfices mais aussi les vulnérabilités des LLMs. Cet article se propose d'explorer en profondeur la technique de prompt injection, une méthode de manipulation des IA qui permet aux attaquants de contourner les garde-fous intégrés et d'obtenir des réponses inappropriées ou dangereuses. En exposant les mécanismes sous-jacents de cette attaque, nous visons à sensibiliser les utilisateurs et les développeurs aux risques potentiels et à proposer des mesures de protection adéquates.
Le Fonctionnement des Modèles de Langage de Grande Taille (LLMs)
Les modèles de langage de grande taille (LLMs) tels que GPT-4 sont des merveilles d'algorithmes d’apprentissage automatique, capables de générer du texte de manière fluide et contextuellement pertinente. Ces modèles sont formés sur des quantités massives de données textuelles, leur permettant d'acquérir une connaissance approfondie des structures linguistiques et des relations contextuelles entre les mots.
En termes simples, les LLMs fonctionnent comme des experts en "puzzles de mots". Lorsqu'on leur fournit un texte ou une instruction, ils utilisent des techniques statistiques avancées et des modèles mathématiques pour prédire les mots ou phrases suivants. Ces prédictions sont basées sur les vastes ensembles de données sur lesquels ils ont été entraînés. Par exemple, si un LLM a été exposé à des millions de documents contenant des séquences de mots spécifiques, il apprendra quels mots sont susceptibles de suivre d'autres mots dans un contexte donné.
Cependant, cette capacité repose principalement sur des corrélations statistiques plutôt que sur une compréhension véritable du sens ou du contexte, comme le ferait un être humain. Un LLM ne comprend pas le texte au niveau conceptuel; il se contente de détecter et de reproduire des schémas de mots. Cela signifie qu'il peut générer des réponses qui semblent logiques et cohérentes en surface, mais qui peuvent manquer de profondeur ou de pertinence contextuelle.
Pour maximiser la qualité des réponses fournies par les LLMs, il est crucial de contextualiser les prompts de manière détaillée. Les techniques de "prompt engineering" recommandent d'inclure autant d'informations pertinentes que possible, telles que le rôle attendu de l'IA, le contexte général de la demande, et l'objectif précis. En fournissant ce cadre contextuel, on aide le modèle à utiliser les éléments disponibles pour produire une réponse plus pertinente et enrichie.
Cependant, cette sensibilité à la formulation des prompts constitue également un talon d’Achille. Les attaques de type "prompt injection" exploitent cette vulnérabilité en manipulant les prompts pour détourner l'IA de ses garde-fous de sécurité. Ces attaques peuvent tromper le modèle en lui faisant générer des réponses inappropriées ou dangereuses, soulignant ainsi les limites de la compréhension contextuelle des LLMs.
Le Prompt Injection : Qu’est-ce que c’est ?
Le prompt injection est une forme avancée de vulnérabilité de sécurité dans les systèmes d'intelligence artificielle et de traitement du langage naturel (NLP). Il survient lorsqu'un attaquant parvient à insérer intentionnellement des données malveillantes ou des instructions dans les entrées textuelles ou vocales traitées par un système d'IA. Ce type d'attaque exploite la capacité du système à interpréter et à répondre aux instructions, souvent en utilisant des techniques de manipulation syntaxique ou sémantique pour déclencher des comportements indésirables. L'objectif principal de l'injection de commandes est de contourner les contrôles de sécurité et de provoquer des actions non autorisées ou imprévues, telles que la divulgation d'informations confidentielles ou la manipulation de l'environnement opérationnel du système. Pour contrer cette menace, les développeurs et les administrateurs système doivent mettre en œuvre des mesures rigoureuses de validation des entrées, de filtrage des commandes et de conception sécurisée des systèmes pour prévenir efficacement ces attaques sophistiquées.
Les attaques par injection de prompt exploitent le fait que les applications basées sur les LLM ne font pas clairement la distinction entre les instructions des développeurs et les entrées des utilisateurs. En rédigeant des prompts soigneusement conçus, les hackers peuvent contourner les instructions des développeurs et contraindre le LLM à exécuter leurs ordres.
Les mécanismes des attaques par injection des promptes
Pour comprendre comment fonctionnent les attaques par injection de prompt, il est utile de d'abord examiner comment les développeurs construisent de nombreuses applications alimentées par les LLM.
Les LLM sont des modèles fondamentaux, des modèles d'apprentissage machine très flexibles formés sur de grands ensembles de données. Ils peuvent être adaptés à diverses tâches grâce à un processus appelé "fine-tuning des instructions". Les développeurs fournissent au LLM un ensemble d'instructions en langage naturel pour une tâche donnée, que le LLM suit.
Grâce au fine-tuning des instructions, les développeurs n'ont pas besoin d'écrire de code pour programmer des applications LLM. Au lieu de cela, ils peuvent rédiger des prompts système, qui sont des ensembles d'instructions indiquant au modèle d'IA comment gérer l'entrée utilisateur. Lorsqu'un utilisateur interagit avec l'application, leur entrée est ajoutée au prompt système, puis le tout est envoyé au LLM comme une seule commande.
La vulnérabilité à l'injection de prompt survient car à la fois le prompt système et les entrées des utilisateurs prennent la même forme : des chaînes de texte en langage naturel. Cela signifie que le LLM ne peut pas faire la distinction entre les instructions et les entrées uniquement sur la base du type de données. Au lieu de cela, il se fie à l'entraînement antérieur et aux prompts eux-mêmes pour déterminer quoi faire. Si un attaquant conçoit une entrée qui ressemble suffisamment à un prompt système, le LLM ignore les instructions des développeurs et exécute ce que le hacker souhaite.
Types d'Attaques par Injection de Prompt
Considérez comment ces types d'attaques par injection de prompt pourraient compromettre les intérêts des entreprises.
Sans contrôles établis pour prévenir ce type d'attaques, les attaquants peuvent rapidement induire en erreur les systèmes d'IA pour qu'ils exécutent ce type d'action. Une attaque par injection de prompt pourrait également tromper un outil pour fournir des informations dangereuses, telles que des instructions sur la construction d'armes ou la production de drogues. Cela pourrait causer des dommages à la réputation, car la sortie de l'outil serait associée à l'entreprise hébergeant le système.
Le prompt lui-même pourrait même être considéré comme la propriété intellectuelle de l'entreprise, car des prompts bien conçus peuvent nécessiter du temps et des ressources pour être développés et pourraient donc avoir une valeur à voler.
Injections de Prompt vs Jailbreaking
Bien que souvent confondus, les injections de prompt et le jailbreaking sont deux techniques distinctes. Les injections de prompt impliquent de dissimuler des instructions malveillantes comme des entrées inoffensives, tandis que le jailbreaking consiste à contourner les protections d'un LLM.
Les prompts système non seulement indiquent aux LLM ce qu'ils doivent faire, mais incluent aussi des protections contre ce qu'ils ne doivent pas faire. Par exemple, un prompt système pour une application de traduction pourrait exclure la traduction de propos offensants.
Jailbreaker un LLM signifie écrire un prompt qui le persuade d'ignorer ces protections, souvent en lui demandant d'adopter une personnalité ou de jouer à un "jeu". Les hackers adaptent constamment leurs techniques d'ingénierie de prompts pour contourner les protections mises à jour par les développeurs de LLM.
Au final, on peut dire que les injections de prompt représentent une menace croissante pour les systèmes d'intelligence artificielle, exploitant la capacité des LLM à interpréter et à exécuter des instructions. Ces attaques mettent en lumière les défis de sécurité associés à l'utilisation des technologies génératives avancées. Pour contrer ces risques, il est crucial d'implémenter des mesures robustes de validation des entrées, de sécurisation des prompts, et de surveillance continue des activités des modèles d'IA. La sensibilisation aux vulnérabilités et la mise en œuvre de bonnes pratiques de sécurité restent essentielles pour protéger les systèmes contre les manipulations malveillantes et assurer leur intégrité et leur fiabilité à long terme.